Dans de nombreuses familles et dans beaucoup de dispositifs éducatifs, une scène revient souvent : un enfant de primaire qui écoute, fasciné, un étudiant venu l’aider à faire ses devoirs ou témoigner de son quotidien à l’université. Pourtant, l’étudiant n’est ni un parent, ni un professeur, ni une star de réseau social. Pourquoi cette figure fonctionne-t-elle si bien comme modèle, miroir et moteur de motivation scolaire ? Comprendre ces mécanismes d’identification permet de mieux orienter le projet scolaire d’un enfant, de prévenir le décrochage et de soutenir sa santé psychologique dans un parcours parfois lourd en évaluations, sélections et comparaisons.
Mécanismes d’identification sociale de l’enfant à un étudiant : concepts de modélisation et de miroir social
Théorie de l’apprentissage social de bandura appliquée à la relation enfant–étudiant
La théorie de l’apprentissage social explique que l’enfant apprend en observant des modèles, en imitant leurs comportements et en intégrant les conséquences qu’ils en retirent. L’étudiant joue ici le rôle de modèle identificatoire crédible : il partage un univers scolaire proche (devoirs, examens, notes), tout en incarnant un stade « supérieur » mais atteignable. Quand un étudiant raconte comment il a surmonté ses difficultés en mathématiques ou en lecture, l’enfant voit concrètement que l’effort peut payer. L’identification est d’autant plus forte que l’étudiant verbalise ses stratégies (“je relis le cours, je fais des fiches, je demande de l’aide”), ce qui nourrit un apprentissage par observation beaucoup plus fin que le simple « regarde comme il est bon élève ».
Un autre point clé de Bandura est le sentiment d’efficacité personnelle. Un enfant qui se dit « je suis nul » diminue ses chances de progresser. En revanche, lorsqu’il entend un étudiant expliquer sans fard qu’il a lui aussi redoublé, douté, puis réussi, un déplacement s’opère : la réussite cesse d’être un don inné pour devenir un processus. Cette narration biographique crée un puissant miroir social, surtout si vous encouragez l’étudiant à décrire aussi ses échecs et pas uniquement ses réussites.
Processus de mimétisme et de projection chez l’enfant d’école primaire
Sur le plan psychologique, l’enfant de primaire fonctionne encore largement par mimétisme. Il imite les gestes, les expressions, jusqu’aux tics de langage des figures qu’il admire. Face à un étudiant, ce mimétisme porte souvent sur des éléments scolaires très concrets : utiliser un surligneur, faire des « fiches », prendre un agenda, regarder l’heure de début du contrôle. Ces gestes, qui semblent anecdotiques à un adulte, contribuent à construire chez l’enfant une identité d’élève compétent.
La projection joue aussi un rôle majeur. L’enfant se projette dans le futur : « quand je serai grand, je serai comme lui ». Contrairement à l’admiration pour un sportif célèbre ou un influenceur YouTube, le scénario « devenir étudiant » reste réaliste, surtout si l’étudiant vient d’un milieu social proche ou habite le même quartier. Le passage de l’imaginaire au possible est alors beaucoup plus fluide, ce qui nourrit une motivation scolaire durable plutôt qu’un rêve inaccessible.
Rôle de la proximité d’âge entre collégien/lycéen et étudiant dans l’identification
La proximité d’âge est un facteur d’identification déterminant. Entre un adulte de 40 ans et un enfant de 10 ans, l’écart semble parfois infranchissable. Entre un étudiant de 20 ans et ce même enfant, la distance paraît soudain réduite : dix ans seulement, quelques classes de différence, un même système d’évaluation. Cette proximité donne l’impression que la trajectoire scolaire est une simple montée d’escaliers, et non une montagne infranchissable.
Les recherches sur le near-peer mentoring montrent d’ailleurs que les tuteurs proches en âge ont souvent un impact plus direct sur la motivation que les adultes. L’étudiant connaît encore « de l’intérieur » la peur du contrôle, le stress des partiels, les exigences implicites des enseignants. Lorsqu’il met des mots sur ces émotions, l’enfant se sent compris et normalisé dans ses propres inquiétudes, ce qui renforce leur lien identificatoire.
Comparaison des figures d’identification : étudiant, enseignant, parent, influenceur YouTube
Face à un enfant, plusieurs figures coexistent : le parent, l’enseignant, l’étudiant, l’influenceur numérique. Chacune porte une fonction spécifique dans la construction de soi. Le parent reste une base affective et normative, mais son statut multi-rôle (soin, règles, sanctions, protection) peut rendre plus difficile l’identification sur le plan strictement scolaire. L’enseignant incarne l’autorité, la note, la justice scolaire ; il est observé, parfois admiré, mais rarement perçu comme quelqu’un à « devenir », surtout à l’école primaire.
Les influenceurs YouTube ou TikTok, eux, offrent des modèles très puissants, mais majoritairement hors de l’école : humour, gaming, lifestyle. L’étudiant occupe donc une zone intermédiaire très stratégique : suffisamment proche des codes numériques pour être perçu comme « de la même génération », mais vivant encore au quotidien les contraintes d’un établissement, d’un emploi du temps, d’examens. Dans cette constellation de modèles, il constitue un compromis efficace entre proximité et crédibilité académique.
Proximité développementale entre l’enfant et l’étudiant : stades cognitifs (piaget, vygotski) et représentations scolaires
Stades opératoires concrets et formels (piaget) : pourquoi l’étudiant reste un modèle atteignable
Selon Piaget, un enfant de 7 à 11 ans se situe au stade des opérations concrètes : il raisonne avec des exemples, des objets, des situations visibles. L’étudiant, lui, est théoriquement au stade des opérations formelles, capable de raisonnements abstraits et d’hypothèses. Pourtant, sur le terrain, de nombreux étudiants oscillent encore entre concret et abstrait, surtout en première année universitaire. Quand un étudiant explique un concept scientifique avec un exemple du quotidien (cuisine, sport, réseaux sociaux), il montre à l’enfant comment passer progressivement du concret à l’abstrait.
Cette proximité développementale rend la figure de l’étudiant moins intimidante qu’un chercheur ou un professeur d’université. L’enfant l’observe en train d’apprendre, de douter, de reposer des questions, ce qui casse l’illusion de la « tête bien faite » innée. Voir quelqu’un encore en train de construire ses raisonnements logiques aide l’enfant à accepter ses propres tâtonnements et à concevoir le développement intellectuel comme un continuum.
Zone proximale de développement (vygotski) et rôle de l’étudiant comme « pair plus expert »
La notion de zone proximale de développement désigne ce que l’enfant ne peut pas encore faire seul, mais peut réussir avec l’aide d’un adulte ou d’un pair plus avancé. L’étudiant s’inscrit parfaitement dans ce rôle de « pair plus expert ». Il n’est pas un expert inatteignable, mais quelqu’un qui vient tout juste de franchir certaines étapes : brevet, bac, concours d’entrée. Cette temporalité récente lui permet de proposer un étayage très ajusté, car il se souvient précisément des obstacles rencontrés.
Concrètement, lors d’une séance de travail, l’étudiant peut décomposer une tâche en micro-étapes : lire l’énoncé, surligner les données, reformuler la consigne, esquisser un plan. L’enfant, accompagné dans cette zone proximale, expérimente la réussite avec aide. Petit à petit, l’étayage se retire, et l’enfant reprend la main. Ce mouvement progressif renforce à la fois ses compétences et sa confiance, tout en consolidant l’identification à ce « grand frère scolaire ».
Schémas mentaux partagés : devoirs, examens, notation, vie de classe
Un levier souvent sous-estimé est la familiarité des schémas mentaux liés à l’école. L’enfant et l’étudiant partagent un même univers de références : contrôles surprises, bulletins scolaires, carnets de liaison, injonctions à « bien travailler », comparaison avec les camarades. Cette culture commune facilite un langage simple, direct, dépourvu de jargon pédagogique. Quand l’étudiant raconte ses propres bulletins mitigés ou ses notes en dents de scie, l’enfant reconnaît des situations qu’il vit déjà, mais transposées quelques années plus tard.
Les émotions associées à ces schémas jouent un rôle crucial. Le trac des examens, l’angoisse de la note, la joie d’un bon résultat ou la déception d’un échec : autant de vécus que l’étudiant peut verbaliser. L’enfant réalise alors que ses propres ressentis ne sont ni isolés ni anormaux, mais s’inscrivent dans une trajectoire scolaire partagée, ce qui renforce encore le sentiment de ressemblance et donc l’identification.
Transition collège–lycée–université : continuité perçue du parcours scolaire par l’enfant
Pour un enfant, le parcours scolaire peut sembler brisé en étapes mystérieuses : collège, lycée général ou professionnel, classes prépa, université, écoles spécialisées. L’étudiant a la capacité unique de raconter cette suite comme une histoire continue : « j’étais en 6e dans tel collège, ensuite en 2de pro ou générale, puis j’ai choisi telle filière… ». Cette narration rend visibles les bifurcations possibles et les choix d’orientation, y compris les réorientations et les redoublements.
En expliquant clairement qu’il existe plusieurs voies (professionnelles, technologiques, générales) et que l’université n’est pas le seul horizon, l’étudiant aide l’enfant à percevoir la diversité des trajectoires plutôt qu’une seule voie noble. Cette vision continue, mais non linéaire, diminue l’anxiété autour de l’orientation et renforce l’idée qu’un projet d’études supérieures se construit pas à pas, en dialogue avec ses propres goûts et ses capacités du moment.
Facteurs socio-affectifs facilitant l’identification de l’enfant à un étudiant en contexte éducatif
Effet de similarité perçue : langage, codes vestimentaires, usages numériques (TikTok, instagram, discord)
L’effet de similarité perçue repose sur un constat simple : on s’identifie plus facilement à quelqu’un qui semble « du même monde ». L’étudiant et l’enfant partagent de nombreux codes : style vestimentaire casual, même références de jeux vidéo, présence sur des plateformes comme TikTok, Instagram ou Discord. Ce terrain commun crée un climat de confiance beaucoup plus rapidement qu’avec un adulte dont les pratiques numériques sont plus éloignées.
Cette proximité ne signifie pas que l’étudiant doive se transformer en influenceur pour capter l’attention. Au contraire, l’intérêt est précisément dans ce double registre : parler de séries ou de réseaux sociaux, mais aussi de révisions de partiels ou de rapport de stage. Pour vous, parent ou enseignant, c’est un levier précieux : en laissant l’étudiant mobiliser ces références partagées, vous favorisez une alliance éducative qui ancre la motivation scolaire dans la culture des jeunes eux-mêmes.
Climat relationnel et attachement sécure dans les dispositifs de tutorat étudiant–élève (ex. AFEV, proxité)
Les programmes de mentorat étudiant–enfant montrent que la qualité du climat relationnel est au moins aussi importante que le contenu des séances. Un enfant a besoin de sentir que l’étudiant qui l’accompagne n’est pas uniquement un correcteur de devoirs, mais une présence fiable, régulière, bienveillante. Lorsque la relation se construit dans la durée, avec des rendez-vous stables, des rituels (débuter par une discussion informelle, finir par un jeu rapide), l’enfant développe un véritable attachement sécure à ce tuteur.
Les études en psychologie montrent que cette sécurité affective favorise l’exploration cognitive : un enfant qui se sent en confiance ose davantage poser des questions, montrer ses erreurs, avouer qu’il n’a pas compris. L’étudiant devient alors un espace protégé où l’échec n’est plus disqualifiant, mais faisant partie du processus d’apprentissage. Ce climat émotionnel positif renforce de manière spectaculaire l’identification à la figure étudiante, désormais associée à la fois au progrès et à la sécurité.
Quand l’étudiant tuteur instaure un espace où l’erreur est possible, l’enfant cesse de cacher ses difficultés et commence à les travailler vraiment.
Gestion de la distance hiérarchique entre étudiant tuteur et enfant accompagné
Un défi important réside dans la gestion de la distance hiérarchique. Si l’étudiant adopte une posture trop magistrale, l’enfant le percevra comme un « mini-prof » et l’identification sera moindre. À l’inverse, une posture trop fusionnelle ou copine-copain risque de diluer le cadre scolaire et les objectifs d’apprentissage. L’enjeu est donc de maintenir une position intermédiaire : ni adulte autoritaire, ni camarade de jeux, mais « grand frère scolaire » ou « grande sœur académique ».
Sur le plan pratique, cela suppose quelques repères simples : vouvoyer ou tutoyer selon le contexte institutionnel ; poser un cadre clair (heure, lieu, objectifs) ; laisser un espace de conversation informelle en début de séance, mais revenir ensuite sur les tâches. Quand cette distance juste est trouvée, l’enfant peut admirer l’étudiant sans se sentir écrasé, et se sentir accompagné sans perdre de vue le travail à accomplir.
Impact des émotions partagées (stress des examens, peur des contrôles, joie de la réussite) sur l’identification
Les émotions constituent un puissant ciment identificatoire. Un étudiant qui reconnaît ouvertement sa propre anxiété lors des partiels envoie un message double : d’un côté, il normalise la peur des contrôles que ressent l’enfant ; de l’autre, il montre qu’il est possible de réussir malgré, et parfois grâce, à cette émotion. Ce partage émotionnel valorise les stratégies de régulation (respiration, planification, pauses) plutôt que le déni ou la honte.
Inversement, la joie partagée d’un progrès – même petit, comme la réussite d’un exercice ou une meilleure note – ancre profondément dans la mémoire de l’enfant l’association « travail avec l’étudiant = succès possible ». Les neurosciences de l’apprentissage confirment que ces moments de satisfaction, surtout lorsqu’ils sont reconnus par une figure significative, renforcent les circuits de la motivation et augmentent la probabilité de persévérance scolaire à long terme.
Plus l’enfant vit de petites victoires scolaires aux côtés d’un étudiant qu’il admire, plus il se raconte à lui-même : « moi aussi, je peux y arriver ».
Programmes de mentorat et tutorat étudiant–enfant : protocoles pédagogiques et études de cas
Mentorat scolaire en france : dispositifs « devoirs faits », AFEV, article 1, télémaque
En France, plusieurs dispositifs structurent déjà cette relation privilégiée entre étudiant et enfant. Le programme « Devoirs faits » au collège propose des temps d’accompagnement aux devoirs, souvent animés par des étudiants ou des assistants d’éducation. Des associations comme AFEV, Article 1 ou Télémaque organisent du mentorat individuel sur l’année, ciblant en particulier les élèves issus de milieux populaires ou scolarisés en éducation prioritaire.
Les évaluations de ces programmes montrent des effets récurrents : amélioration du sentiment d’efficacité personnelle, montée de la motivation intrinsèque (le « j’ai envie de comprendre ») et réduction du risque de décrochage. Un élève accompagné par un étudiant présente aussi plus souvent un rapport apaisé au travail scolaire, car il a enfin un espace pour poser les questions qu’il n’ose pas formuler en classe ou à la maison.
Structuration d’une séance de tutorat entre étudiant et élève de CM2 ou 6e
Une séance de tutorat efficace suit généralement une trame simple mais structurée. Voici un schéma type que vous pouvez adapter :
- Accueil et échange rapide sur la semaine scolaire, pour créer le lien et repérer l’humeur de l’enfant.
- Clarification des objectifs de la séance : un contrôle à préparer, un devoir à rendre, une notion à consolider.
- Travail guidé avec étayage : l’étudiant montre, l’enfant essaie, on corrige ensemble.
- Phase d’autonomisation : l’enfant refait seul un exercice similaire ou explique la notion à l’étudiant.
- Bilan positif : repérer une réussite, même minime, et fixer un micro-objectif pour la prochaine séance.
Ce déroulé permet d’articuler à la fois la dimension affective (discussion, reconnaissance) et la dimension cognitive (apprentissage, entraînement), tout en laissant à l’étudiant l’espace pour jouer pleinement son rôle de modèle identificatoire.
Analyse d’études empiriques sur le tutorat par les pairs et near-peer mentoring (johnson, topping)
Les recherches internationales sur le tutorat par les pairs et le near-peer mentoring convergent sur plusieurs points. D’abord, l’impact ne se limite pas aux résultats scolaires bruts : les gains les plus forts concernent souvent la motivation, la persévérance et l’estime de soi. Ensuite, l’effet est particulièrement marqué chez les élèves qui se sentent en difficulté ou qui doutent de leur place à l’école. L’identification à un étudiant venant parfois d’un milieu similaire produit un effet de « preuve sociale » : la réussite devient envisageable pour « quelqu’un comme moi ».
Un autre résultat important est le bénéfice pour l’étudiant lui-même. En expliquant, en vulgarisant, en accompagnant, il renforce ses propres compétences métacognitives et sa confiance. Cette double valorisation (de l’enfant et du tuteur) consolide la relation et augmente sa durabilité, ce qui est un facteur clé de succès pour les programmes de mentorat à long terme.
Indicateurs de réussite : motivation intrinsèque, sentiment d’efficacité personnelle, persévérance scolaire
Comment savoir si l’identification de l’enfant à l’étudiant produit des effets tangibles ? Au-delà des notes, plusieurs indicateurs qualitatifs peuvent être observés. La motivation intrinsèque se manifeste par des signes simples : l’enfant pose plus de questions, il commence ses devoirs plus spontanément, il exprime sa curiosité (« pourquoi ? », « comment ça marche ? »). Le sentiment d’efficacité personnelle se lit dans son discours : moins de « je suis nul », plus de « j’ai compris cette partie-là, pas encore le reste ».
La persévérance scolaire se mesure dans la durée : diminution des oublis de matériel, moindre évitement des matières difficiles, maintien de l’effort malgré un contrôle raté. Lorsque ces indicateurs progressent, la figure de l’étudiant peut être considérée comme un levier efficace, même si les résultats chiffrés mettent parfois plus de temps à s’améliorer de manière visible.
Études de cas en REP/REP+ : adaptation culturelle et socio-économique des binômes étudiant–enfant
En éducation prioritaire (REP/REP+), l’enjeu n’est pas seulement scolaire, mais aussi social et culturel. L’enfant peut se demander : « les études supérieures sont-elles vraiment pour moi ? ». Dans ces contextes, le choix des étudiants tuteurs est déterminant. Lorsqu’ils viennent du même territoire, qu’ils ont connu des parcours de vie proches, ils incarnent de manière très concrète la possibilité d’une ascension scolaire sans renier son milieu.
Les binômes réussis sont ceux qui intègrent cette dimension socio-culturelle : l’étudiant valorise les savoirs du quartier, les ressources familiales, les compétences extra-scolaires de l’enfant (entraide, responsabilité, débrouillardise). Cette reconnaissance renforce puissamment l’identification : l’enfant ne se sent plus sommé de « devenir un autre », mais invité à prolonger ce qu’il est déjà vers un nouveau cadre – le lycée, l’université, la formation professionnelle qualifiante.
Quand l’étudiant montre qu’il respecte la culture de l’enfant et de sa famille, le projet d’études devient un prolongement possible de cette culture, et non une trahison.
Représentations médiatiques de l’étudiant et impact sur le projet scolaire de l’enfant
Les médias véhiculent plusieurs images de l’étudiant : figure de liberté (fêtes, colocation, engagement associatif), figure de précarité (jobs cumulés, difficultés financières), ou figure d’excellence (prépas, grandes écoles). Un enfant capte ces représentations à travers les séries, les reportages télévisés, les réseaux sociaux. Si l’université est systématiquement présentée comme réservée à une élite ou comme synonyme de galère, l’identification peut devenir ambivalente : attirance pour la liberté, mais crainte de l’instabilité.
Pour contrer ces images parfois stéréotypées, la rencontre directe avec un étudiant est essentielle. Elle permet de nuancer, de complexifier : il existe des étudiants en alternance, des filières courtes, des reconversions, des réussites silencieuses. Utiliser des exemples concrets – un étudiant infirmier, un futur éducateur spécialisé, un apprenti en BTS qui poursuit ensuite en licence professionnelle – aide l’enfant à percevoir la variété des destins étudiants et à y trouver une place qui lui ressemble. L’objectif n’est pas de vendre un modèle unique, mais d’ouvrir l’horizon des possibles.
Stratégies pour les parents et enseignants afin de mobiliser la figure de l’étudiant comme levier motivationnel
Pour un parent ou un enseignant, la figure de l’étudiant peut devenir un véritable outil pédagogique, à condition de l’intégrer de manière réfléchie. Une première stratégie consiste à organiser des temps de rencontre ciblés : invitation d’anciens élèves maintenant en licence, échanges en visio avec un cousin ou une cousine à l’université, participation à des interventions dans la classe lors de semaines thématiques (orientation, métiers, santé mentale étudiante). Plus ces témoignages sont concrets (horaires, difficultés, soutiens, aides financières, logement), plus l’enfant peut se projeter.
Une deuxième piste est d’encourager des formes de parrainage informel. Si un adolescent du quartier est en lycée pro ou en IUT, il peut devenir pour un élève de CM2 ou de 6e un repère accessible. En tant qu’adulte, votre rôle est alors d’assurer un cadre sécurisant, de clarifier les attentes (fréquence des échanges, type d’aide possible) et de valoriser ces relations sans les surcharger d’enjeux. L’objectif n’est pas de créer un super-héros académique, mais un compagnon de route un peu plus avancé.
Enfin, il est utile de travailler explicitement avec l’enfant sur la question de l’identification : « à qui as-tu envie de ressembler à l’école ? », « qu’est-ce que tu admires chez cet étudiant ? », « qu’est-ce que tu pourrais déjà faire, à ton niveau, pour te rapprocher de ce modèle ? ». Ce questionnement l’aide à transformer l’admiration en petites actions concrètes : ranger son sac, relire une leçon, oser lever la main. Comme pour l’entraînement sportif, ces micro-gestes quotidiens, inspirés par une figure étudiante valorisée, construisent progressivement une identité d’élève engagé, capable de tenir dans la durée un projet scolaire qui lui ressemble.
